Je me réveille, plusieurs jours après le tragique événement du 4 octobre 1990. J'ai du mal à réaliser ce qui m'arrive. Je suis dans une salle des soins intensifs de l'hôpital Sainte-Justine… Une infirmière est à mes côtés en permanence, prenant mes signes vitaux à tout moment, mais de façon surprenante pour moi: qu'il s'agisse de prendre ma température sous mon bras ou de prendre mon pouls sous mes deux pieds et de comparer les résultats, ces façons de procéder sont toutes nouvelles pour moi et je n'y comprends pas grand-chose, pour ne pas dire absolument rien. D'ailleurs, ce n'est pas surprenant, puisque je ne connais pas l'étendue des dégâts causés par l'énorme roue de ce mastodonte qui m'est passé dessus. Je m'examine un peu, autant que je puisse le faire dans ces conditions, afin de constater un peu dans quel état je suis. Arrivée à mon ventre, je touche d'énormes tiges métalliques et je les suis, pour constater avec surprise qu'elles pénètrent en moi par trois trous de chaque côté de mon ventre et que le tout se réunit au-dessus, de façon à tenir en un seul morceau, mais je ne sais pas à quelle profondeur tout cela se trouve à l'intérieur de mon corps et encore moins l'utilité de ces tiges. Puis, j'ai des tubes partout. Je suis reliée à plusieurs machines qui ont certainement toutes leur raison d'être branchées à moi, mais pour l'instant, j'ignore tout. Je veux savoir, je veux comprendre… Je vais poser des questions; ainsi, j'aurai très certainement des réponses. J'essaie de parler, mais aucun son ne sort de ma bouche. C'est comme si tout était bloqué dans ma gorge. Je porte attention et je m'aperçois que j'ai quelque chose qui est installé dans ma bouche: un tube me reliant à un respirateur. Wooo! C'est plus grave que grave… Pourquoi n'arrivais-je pas à respirer par moi-même? Et puis, ne pas parler, ne pas pouvoir interroger les infirmières et médecins qui gravitent autour de moi, c'est catastrophique pour moi… Je ne saurais même pas expliquer comment, mais je finis par me faire comprendre de quelque façon que ce soit et, une fois qu'on se rend compte que je suis consciente et bien éveillée, on m'explique que j'ai eu 5 fractures au bassin, que la circulation dans ma jambe gauche a été gravement, très gravement endommagée, qu'ils ont dû procéder à des transferts de veine d'une jambe à l'autre et à des pontages afin de tenter de créer une circulation sanguine acceptable dans cette jambe. Mais on me dit aussi que la partie n'est pas encore gagnée; on ne sait pas encore si on pourra la sauver et si ce système circulatoire de dépannage tiendra le coup. C'est pourquoi on prend régulièrement mon pouls sous mon pied gauche: on vérifie si le sang y circule convenablement. D'ailleurs, l'inquiétude règne visiblement chaque fois qu'on répète cette procédure: sous mon pied droit, le pouls est parfait; sous le gauche, il est presque imperceptible… De plus, j'entends mes parents s'attrister de voir la couleur anormale de mon pied, qui passe du bleu au blanc… Puis à la peau qui sèche et s'en détache… Je commence donc à faire des liens: on prend ma température sous mon bras car ma bouche est obstruée par le tube qui me permet de respirer. J'ai le bassin fracturé à 5 endroits, c'est pourquoi j'avais l'impression d'avoir le pubis détaché du reste du corps. J'ai une jambe bien amochée, mais qui se bat pour rester. Voilà le tableau de ce que je comprends, à ce stade de mon rétablissement.
Malgré cette série de constatations désolantes et effrayantes, je n'ai pas très mal et vous aurez deviné que c'est parce qu'on me soulage avec de très puissantes doses de morphine que je reçois très régulièrement; en fait, dès que je démontre des signes de souffrance. Et puis, mes parents sont avec moi constamment. Il y a toujours soit mon père ou ma mère à mon chevet, qui me caresse, me parle, me dit que j'ai eu tout un choc, mais que je me remettrai très vite sur pied et que tout rentrera dans l'ordre et qu'on fera une grande fête une fois que tout cela sera terminé. Bref, on me soulage de mes souffrances et on me rassure. Quoi de mieux?
Cette période, qui devrait être la plus inquiétante de tout mon rétablissement, est la plus réconfortante et enveloppante. On est à mes côtés 24 heures sur 24, à l'écoute de mes moindres besoins et dès que la douleur se pointe, hop! On la chasse à grands coups d'injections bienfaisantes. Bref, je suis aussi en sécurité que le foetus dans le ventre de sa mère…
Puisque les deux seules personnes autorisées à être en contact avec moi sont mes parents, un système très ingénieux se met en place pour me permettre d'avoir des nouvelles du reste de ma famille et de mes amis qui ne peuvent pas me voir à ce moment-ci. À l'aide d'un magnétophone très portatif qui circule d'une personne à l'autre, on m'enregistre de merveilleux témoignages sur une cassette et, une fois que tout le monde y a ajouté son petit mot, l'appareil revient dans ma chambre, par l'un ou l'autre de mes parents et, bonheur suprême, j'écoute les voix de toutes ces personnes si chères à mon coeur… On me dit tout un tas de choses et ce qui est fabuleux, c'est que même si tout le monde est atterré, le message premier est d'un positif extraordinaire: «Tu as eu tout un choc ma chérie, mais tu vas passer à travers ça comme une gagnante! Tu vas très vite guérir et tu sais quoi? On va faire un super gros party quand tu seras guérie. On va fêter en grand! Reviens-nous vite et en forme! On est tous avec toi. On t'aime et on pense à toi très fort.» C'était à peu près l'essentiel des messages qu'on me laissait sur cette cassette magique. Toutes les voix si précieuses de mes parents, mon frère, mes tantes, des cousins, cousines, des amis, mon amoureux, etc. Tout le monde y était; il ne manquait absolument personne. Si vous saviez comme j'avais hâte de ne plus avoir ce sacré tube dans la bouche pour pouvoir leur répondre…
Mon amoureux a même été inspiré par cette cassette et m'en a préparé une bien spéciale, juste à lui: on y retrouvait plein de superbes chansons Country qui avaient un lien avec nous deux ou avec moi simplement, le tout entrecoupé de petits messages de son cru. J'avais droit à une émission de radio personnalisée où mon bien-aimé était l'animateur du jour. C'était extrêmement touchant.
Au bout de quelques semaines, alors que je faisais mille et un signes qui voulaient dire «Quand allez-vous m'enlever ce maudit tube?», on m'explique que je dois garder ce tube tant et aussi longtemps que je ne respirerai pas entièrement par moi-même. Je me mets donc à analyser ma respiration et je constate avec stupéfaction et horreur que j'oublie très fréquemment de respirer moi-même! Mais qu'est-ce que c'est que cette plaisanterie? Depuis quand oublie-t-on de respirer? Oui, je dois réagir et ça presse! «Je dois respirer… Respire, Katia; respire…» Je vous assure! Cela peut paraître extrêmement bizarre, mais je me mets à cet apprentissage de manière très intensive, me répétant de respirer à tout moment; si bien que je finis par développer à nouveau ce réflexe si naturel qu'est celui de la respiration. Pour mon plus grand bonheur, un jour, on retire les tubes que j'ai dans le nez et dans la bouche. ENFIN!!! C'est alors que je m'emploie intensivement à poser toutes les questions que j'étais obligée de garder pour moi et aussi à répondre à tous les merveilleux messages que j'avais entendus sur la superbe cassette. Je tiens à tous mes proches des propos ressemblant à ceci: «Merci pour vos beaux messages… Oui, je vous le promets, je vais me sortir de ça comme une vraie "winner"! Et puis je vous prends au mot, car je le veux, le gros party que vous voulez faire une fois que je serai guérie. Un méchant party, je vous le promets!» Tous me parlaient toujours de faire une grande fête car j'ai une réputation de grande fêteuse qui me précède… (rire)
Une fois les tubes retirés, on finit par constater, au bout de quelques semaines, que mon état ne nécessite plus de demeurer aux soins intensifs. On me transfère donc à ma chambre au 6e étage de l'hôpital (chambre 6103: 6e étage, bloc 1, lit 3; j'ai demandé ce que voulait dire ce chiffre, comme je demande ce que tout veut dire…). Mais, une fois transférée, le choc est brutal: ce ne sont plus les soins intensifs; je ne suis pas seule sur l'étage. Lorsque j'ai besoin de quelque chose, on n'accourt plus dans les 30 secondes; je dois sonner et… attendre… Les infirmières et préposés sont plus pressés; j'ai donc l'impression de les déranger un peu lorsque je fais une demande. Bref, j'ai l'impression d'être moins chaleureusement accueillie sur l'étage que je ne l'ai été aux soins intensifs et ça me donne un coup. Heureusement, il y a une belle récompense à cette attention moins importante du personnel hospitalier: tous mes proches peuvent venir me voir! Yes!!! Et puis, des liens se créent avec certaines infirmières toutes spéciales aussi.
Lors du prochain «Petit bout de moi», je vous entraînerai dans le vif du rétablissement. Je vous ferai vivre les soirées de musique que mon père et moi passions ensemble dans ma chambre d'hôpital, des chansons que j'apprenais, de mes premières leçons de guitare, de la visite très nombreuse qui me remontait le moral, des belles périodes de lecture avec ma mère, sans oublier tous les soins qui se poursuivaient, afin que mon état continue à s'améliorer.
C'est un rendez-vous!
Permettez-moi de m'ouvrir à vous en toute simplicité, sans prétention et avec toute mon amitié. Ce blogue constitue mon journal intime, tout simplement. J'espère que vous prendrez plaisir à me cotoyer via mes confidences et aussi que j'aurai le bonheur de vous lire.
dimanche 11 novembre 2012
samedi 3 novembre 2012
Des petits bouts de moi #15: Tout bascule...
Si vous permettez, je vais employer le présent pour ce «petit bout de moi», afin de vous transporter à l'époque où je veux vous inviter à me suivre et pour vous faire vivre les différentes scènes de manière aussi réelle que possible.
Nous sommes à l'automne 1990. J'ai eu 16 ans le 6 septembre de cette même année. Je me sens à un carrefour important dans ma vie. Un courant m'emporte, je le sens bien. Ma passion pour la musique étant bien définie depuis toujours, j'aurai enfin la chance de l'étudier dans toute sa splendeur, sous toutes ses notes quoi! Mais tout cela est nouveau pour moi. Découvrir le style classique, en étudier ses origines, la comprendre dans toutes ses possibilités de structure, la chanter aussi. Ouf! On est bien loin du Country! Je me sens comme en pays étranger, mais j'adore ce dépaysement et je n'ai pas assez de tous mes sens pour m'émerveiller de tout ce que je reçois durant ce début de mes études collégiales.
Lorsque j'ai rempli les formulaires de demande d'admission au Cégep, j'ai dû choisir deux instruments de musique que je souhaitais étudier: mon choix s'est arrêté sur le chant et le piano. En choisissant le chant, je me retrouve avec de multiples occasions de chanter cette musique classique que j'apprends à connaître. Outre les cours de chant comme tels, j'ai également des ateliers appelés «petit ensemble vocal», où l'on apprend une pièce de Bach chantée en allemand s'il vous plaît! Ouf! De plus, ma familiarisation avec l'allemand ne s'arrête pas là, puisque j'ai aussi un cours de chorale à suivre, avec tous les étudiants du département de musique, sauf ceux qui ont choisi un instrument à vent comme instrument principal. Nous sommes donc 85 élèves dans cette magnifique chorale où on étudie plusieurs pièces à la fois, qui me font apprivoiser l'allemand, là aussi. Puis, mon contact avec les langues étrangères se poursuit, puisque je dois apprendre deux pièces en italien dans le cadre de mon cours de chant. Ouf! Que de nouveauté! Seuls les cours de théorie musicale, solfège et piano me permettent d'évoluer dans une certaine zone de confort.
Pendant ce temps, ma carrière Country démarre véritablement. Depuis 1989, je chante officiellement de façon professionnelle, me produisant en spectacle tantôt avec mon père, tantôt seule. Et puis, depuis cet été 1990, nous avons commencé à recevoir des invitations à nous produire en famille, alors nous donnons maintenant certains spectacles à quatre: mon père Paul, ma tante Julie, ma cousine Dani ainsi que moi-même. Un projet d'album de Noël nous a été proposé. C'est pour bientôt et cela promet de lancer La Famille Daraîche en tant que groupe bien défini. Tout est prometteur et je suis habitée par une euphorie grandissante à mesure que je vois se pointer toutes ces éventualités à l'horizon.
Jeudi, 4 octobre 1990
Après ma journée au Cégep, mon amie Lucie et moi nous sommes donné rendez-vous à la station de métro Berri afin d'aller souper ensemble et effectuer quelques emplettes. Entre autres, j'aurais besoin de quelques partitions musicales. Dans nos spectacles à mon père et moi, je chante régulièrement quelques succès issus de la chanson pop, même si nous chantons du Country. Ainsi donc, je me suis appropriée ce grand succès de Julie Masse «C'est zéro» et cette merveilleuse chanson de Marie-Denise Pelletier «À 17 ans». Les gens apprécient beaucoup, même si nous sortons légèrement du cadre auquel ils sont familiers. C'est une idée de mon père de présenter ce petit segment pop dans notre spectacle et j'avoue que ça me plaît de pouvoir offrir à mon public des chansons bien de mon temps et que j'aime écouter. Cela me permet de partager avec eux mes goûts musicaux autres que Country et de leur faire découvrir une autre facette de ma personnalité. Dans cet ordre d'idées, mon papa m'a proposé d'ajouter deux nouvelles chansons à notre petit répertoire pop: «Au nom de la raison» interprétée par Laurence Jalbert ainsi que «Souvenirs retrouvés» de Francine Raymond. Pour ce faire, il souhaiterait pouvoir étudier les accords de ces chansons à l'aide de partitions musicales, ce que je me propose d'aller chercher moi-même, en m'offrant, par la même occasion, l'album de Laurence Jalbert qui comporte justement «Au nom de la raison».
C'est donc Archambault Musique qui se trouve en tête de mes priorités de magasinage ce soir. Donc, Lucie et moi, après un bon souper entre grandes amies, nous nous dirigeons vers ce merveilleux royaume de la musique où l'on a envie de tout acheter tellement toute la musique tant convoitée s'y trouve!Une fois mes petites trouvailles achetées, je quitte les lieux, Lucie à mon bras (parmi mes amis non-voyants, je suis presque toujours celle qui a le meilleur résidu visuel, alors c'est toujours moi qui fais office de guide, pour mon plus grand plaisir d'ailleurs). Nous empruntons la ligne orange, partant du métro Berri pour nous arrêter à la station la plus près de chez moi: Beaubien.
Nous sortons de la station de métro et je constate avec désolation que l'autobus que nous devons prendre pour aller chez moi (le numéro 18 Beaubien) est déjà là et s'apprête à repartir, tous les gens qui l'attendaient étant montés à bord. Réalisant que nous n'aurons pas le temps de nous dépêcher suffisamment pour pouvoir le prendre, je dis à mon amie: «Je crois que nous ferions mieux d'attendre le prochain».
Mais, coup de théâtre… Après avoir légèrement avancé, comme s'il s'apprêtait à quitter définitivement l'arrêt, le chauffeur immobilise de nouveau son véhicule, question de bien se préparer au prochain virage qu'il devra effectuer. Pour moi, cela me laisse l'impression suivante: il nous a vues, Lucie et moi, et s'est arrêté pour nous permettre de monter à bord. Spontanément, je dis à Lucie: «Oh! Il s'est arrêté! Je crois qu'il nous a vues. Viens! On y va!» C'est ainsi que nous avançons, d'un bon pas, vers le mastodonte qui (l'histoire me l'apprendra dans quelques secondes à peine) repart déjà, puisque le chauffeur ne nous avait pas vues, en fait, mais se préparait seulement à effectuer un virage à droite… Puisque je crois toujours qu'il me voit, je m'avance jusqu'aux portes de l'autobus, étant plus que certaines qu'elles s'ouvriront pour nous permettre d'y monter. Mais l'autobus repart et, en amorçant son virage, me pousse violemment et me propulse par terre, couchée sur le côté droit, les deux jambes dans la rue et le reste du corps sur le trottoir… Je suis couchée par terre, trop abrutie par la douleur de ma chute pour avoir le temps de me relever, et j'aperçois très bien la roue arrière droite de l'autobus qui continue à rouler et qui se dirige, inexorablement, vers ma cuisse gauche… Tout cela se déroule à une vitesse folle, en quelques secondes… La roue approche et je me dis: «Ça y est… C'est terminé… J'ai eu une très belle vie heureuse, des bons parents, des bons amis, des bons professeurs… J'ai été aimée partout où je suis passée… J'ai sûrement fait tout ce que j'avais à faire ici…» J'étais absolument certaine de trouver la mort sous cette roue énorme et si lourde… Elle approche, puis roule sur ma cuisse gauche, mais le corps humain est si extraordinaire qu'il parvient à s'anesthésier de lui-même, afin qu'on ne ressente pas la douleur insupportable qui devrait normalement accompagner un tel traumatisme. Alors, tout ce que je puis dire sur la sensation qui accompagne une roue d'autobus qui vous roule sur le corps, c'est que c'est EXTRÊMEMENT LOURD, mais pas douloureux; du moins, pas sur le coup, mais croyez-moi, ça viendra, la douleur…
L'autobus a roulé sur moi… Mais… je suis toujours là! Bien vivante! Je respire sans peine! Wow! Quel miracle! Comment cela est-il possible? Tout à coup, j'entends une foule s'agglutiner autour de moi… Mon amie Lucie qui est catastrophée et qui panique, demandant qu'on appelle les secours… Puis, très vite, des ambulanciers et des policiers sont dépêchés sur les lieux et me bombardent de questions qui m'apparaissent toutes aussi saugrenues qu'énervantes, car je n'en comprends absolument pas l'utilité à ce moment. «Comment t'appelles-tu?» «Quel jour on est?» «Quelle heure est-il?» «Où es-tu?» Wooooo!!!!! Assez!!! Pourquoi ces foutues questions? C'est ridicule! Pourquoi aurais-je oublié mon propre nom? Franchement! Voici ce que je réponds, du tac au tac: «OK! Écoutez-moi bien: je m'appelle Katia Daraîche. J'ai 16 ans. On est le 4 octobre 1990. Il doit être rendu près de 21h avec tout ce niaisage-là. Je viens de me faire broyer par un maudit autobus et j'ai mal, alors pouvez-vous vous dépêcher à faire quelque chose pour que je cesse de souffrir le martyr ainsi? Merci beaucoup.»
C'est la procédure… Je ne dois pas m'endormir, pas perdre connaissance, alors on me parle… On demande le numéro de téléphone de chez moi, tous les numéros de téléphones utiles, bref. Puis, on procède à un examen des dégâts… Voilà qu'on passe les ciseaux dans mes vêtements: HORREUR!!! Pendant ce temps, j'essaie de voir ce qui bouge encore parfaitement et, oh! Je ne parviens pas à bouger ma jambe gauche… Pire encore, je ne la sens plus du tout… En plus, en tentant de bouger les jambes, j'ai l'impression que mon pubis est détaché du reste de mon corps et j'entends un «crounch» à vous donner des frissons de désagrément… Que se passe-t-il avec mes os? Suis-je en tout petits morceaux, coudonc?? On m'installe sur une civière afin de me hisser dans l'ambulance… Oh! Qu'elle est dure, cette civière! Comme si j'étais encore sur l'asphalte! Mais je ne dis plus rien; j'attends avec impatience d'être à l'hôpital et qu'on soulage mon mal qui est atroce maintenant… Vite!
Une fois arrivés à l'hôpital Sainte-Justine, on procède à tous les tests nécessaires: radiographies, échographies et autres. Constat: j'ai 5 fractures de bassin (dont 2 à l'avant, de chaque côté du pubis, d'où l'impression affreuse de le sentir détaché du reste de mon corps) et 3 à l'arrière… Puis, plus aucune circulation sanguine dans ma jambe gauche. Les médecins sont formels: lorsqu'ils ouvriront ma jambe afin de constater les dégâts, il y aura hémorragie, c'est clair. Ils ne savent pas s'ils parviendront à la sauver, cette jambe… Il se pourrait qu'ils soient dans l'obligation de procéder à une amputation… Mes parents, arrivés sur les lieux en toute hâte, protestent vigoureusement: «Faites tout ce que vous pouvez pour la sauver… S'il vous plaît….»
De mon côté, pendant que je passe tous ces tests, on se dépêche de soulager mes souffrances et, très vite, je perds toute notion du temps… pour plusieurs jours… Le dernier souvenir, mais certainement le plus émouvant pour moi, que je conserve du moment qui a précédé mon entrée en salle d'opération, est une toute petite conversation entre mon père et moi qui s'est déroulée à peu près comme suit:
Papa: «Mon amour, si tu te sors de cette épreuve-là, je lâche toute la cochonnerie que je consomme».
Moi: «Alors, mon amour, si j'ai pu t'offrir ce cadeau par mon épreuve, eh bien, ça aura donné quelque chose de formidable. Je m'en sortirai, je te le promets…»
Tout ce que j'ai pu savoir, par la suite, c'est que j'ai passé 12 heures sur la table d'opération, question d'effectuer des miracles pour tenter de rétablir une certaine circulation sanguine dans ma jambe gauche, le tout en transférant une veine très importante de ma jambe droite à la gauche, question de lui redonner une certaine circulation. On effectue aussi des pontages, bref, je suis bien loin d'être médecin, mais on procède, à l'aide de plusieurs interventions extrêmement délicates, à la reconstruction du système circulatoire de ma jambe gauche. On n'est pas encore sûr que ça tiendra le coup. C'est très risqué et il n'y a que de très faibles chances que ça fonctionne, mais on joue le tout pour le tout. On espère un miracle, un vrai. Aussi, il a fallu procéder à l'installation d'un fixateur externe dont le rôle est de maintenir les os de mon bassin dans leur position normale et de s'assurer qu'ils garderont la position jusqu'à ce qu'ils aient totalement repris ensemble… En clair, cela signifie que lorsque je me réveille de ce périple de quelques jours dans la brume du sommeil, je constate que j'ai des broches qui me sortent du ventre et qui me donnent l'impression que j'ai un truc très très lourd sur moi, dont je n'arrive pas à me débarrasser et je ne comprends pas trop ce qui m'arrive…
De plus, comme l'opération a été très longue et que ma respiration a probablement fonctionné au ralenti très longtemps, je suis branchée à un respirateur et, donc, je suis intubée. J'ai un tube dans le nez, puis un autre, ô malheur! dans la bouche! Je ne peux donc absolument pas émettre un son. Moi, ne pas parler? Catastrophe! Surtout que j'ai un milliard de questions à poser. Je veux savoir ce que j'ai, l'état dans lequel j'étais en arrivant à l'hôpital et comment je suis, maintenant. Et mes chances de m'en tirer indemne, quelles sont-elles? Quand vais-je pouvoir ressortir d'ici et retrouver ma vie d'avant l'accident? J'apprends les réponses à toutes ces questions, une bribe à la fois, au fil des conversations que j'entends entre les infirmières ou médecins et mes parents, qui sont les seules personnes autorisées à venir me voir, puisque je suis aux soins intensifs et que le nombre de visiteurs y est très restreint.
Heureusement, j'ai une famille exceptionnelle. Mes parents sont toujours là, au moins un des deux, auprès de moi… On me câline, on me cajole, on me parle afin de me rassurer, de me réconforter… Je reçois des doses massives de morphine, il va sans dire, pour apaiser autant que possible la douleur qui est reine maîtresse dans mon corps tout entier. Alors, lorsque je suis relativement bien soulagée, avec mes parents à mes côtés, qui me réconfortent et me sécurisent, je parviens à avoir l'impression de me sentir bien, enveloppée par leur amour.
C'est dans ce climat de solidarité extrême et d'indéfectible amour que je remonterai la pente, tout doucement, mais officiellement, trouvant mille et une façons d'agrémenter cette terrible épreuve, parvenant même à remonter le moral de mes visiteurs! Mais tout ce beau cheminement, laborieux mais si extraordinaire, je vous le réserve pour un prochain «petit bout de moi». Je vous donne donc rendez-vous, encore à l'hôpital Sainte-Justine, lors de mon prochain article, mais cette fois, pour vous faire vivre ma fulgurante remontée vers la santé!
Nous sommes à l'automne 1990. J'ai eu 16 ans le 6 septembre de cette même année. Je me sens à un carrefour important dans ma vie. Un courant m'emporte, je le sens bien. Ma passion pour la musique étant bien définie depuis toujours, j'aurai enfin la chance de l'étudier dans toute sa splendeur, sous toutes ses notes quoi! Mais tout cela est nouveau pour moi. Découvrir le style classique, en étudier ses origines, la comprendre dans toutes ses possibilités de structure, la chanter aussi. Ouf! On est bien loin du Country! Je me sens comme en pays étranger, mais j'adore ce dépaysement et je n'ai pas assez de tous mes sens pour m'émerveiller de tout ce que je reçois durant ce début de mes études collégiales.
Lorsque j'ai rempli les formulaires de demande d'admission au Cégep, j'ai dû choisir deux instruments de musique que je souhaitais étudier: mon choix s'est arrêté sur le chant et le piano. En choisissant le chant, je me retrouve avec de multiples occasions de chanter cette musique classique que j'apprends à connaître. Outre les cours de chant comme tels, j'ai également des ateliers appelés «petit ensemble vocal», où l'on apprend une pièce de Bach chantée en allemand s'il vous plaît! Ouf! De plus, ma familiarisation avec l'allemand ne s'arrête pas là, puisque j'ai aussi un cours de chorale à suivre, avec tous les étudiants du département de musique, sauf ceux qui ont choisi un instrument à vent comme instrument principal. Nous sommes donc 85 élèves dans cette magnifique chorale où on étudie plusieurs pièces à la fois, qui me font apprivoiser l'allemand, là aussi. Puis, mon contact avec les langues étrangères se poursuit, puisque je dois apprendre deux pièces en italien dans le cadre de mon cours de chant. Ouf! Que de nouveauté! Seuls les cours de théorie musicale, solfège et piano me permettent d'évoluer dans une certaine zone de confort.
Pendant ce temps, ma carrière Country démarre véritablement. Depuis 1989, je chante officiellement de façon professionnelle, me produisant en spectacle tantôt avec mon père, tantôt seule. Et puis, depuis cet été 1990, nous avons commencé à recevoir des invitations à nous produire en famille, alors nous donnons maintenant certains spectacles à quatre: mon père Paul, ma tante Julie, ma cousine Dani ainsi que moi-même. Un projet d'album de Noël nous a été proposé. C'est pour bientôt et cela promet de lancer La Famille Daraîche en tant que groupe bien défini. Tout est prometteur et je suis habitée par une euphorie grandissante à mesure que je vois se pointer toutes ces éventualités à l'horizon.
Jeudi, 4 octobre 1990
Après ma journée au Cégep, mon amie Lucie et moi nous sommes donné rendez-vous à la station de métro Berri afin d'aller souper ensemble et effectuer quelques emplettes. Entre autres, j'aurais besoin de quelques partitions musicales. Dans nos spectacles à mon père et moi, je chante régulièrement quelques succès issus de la chanson pop, même si nous chantons du Country. Ainsi donc, je me suis appropriée ce grand succès de Julie Masse «C'est zéro» et cette merveilleuse chanson de Marie-Denise Pelletier «À 17 ans». Les gens apprécient beaucoup, même si nous sortons légèrement du cadre auquel ils sont familiers. C'est une idée de mon père de présenter ce petit segment pop dans notre spectacle et j'avoue que ça me plaît de pouvoir offrir à mon public des chansons bien de mon temps et que j'aime écouter. Cela me permet de partager avec eux mes goûts musicaux autres que Country et de leur faire découvrir une autre facette de ma personnalité. Dans cet ordre d'idées, mon papa m'a proposé d'ajouter deux nouvelles chansons à notre petit répertoire pop: «Au nom de la raison» interprétée par Laurence Jalbert ainsi que «Souvenirs retrouvés» de Francine Raymond. Pour ce faire, il souhaiterait pouvoir étudier les accords de ces chansons à l'aide de partitions musicales, ce que je me propose d'aller chercher moi-même, en m'offrant, par la même occasion, l'album de Laurence Jalbert qui comporte justement «Au nom de la raison».
C'est donc Archambault Musique qui se trouve en tête de mes priorités de magasinage ce soir. Donc, Lucie et moi, après un bon souper entre grandes amies, nous nous dirigeons vers ce merveilleux royaume de la musique où l'on a envie de tout acheter tellement toute la musique tant convoitée s'y trouve!Une fois mes petites trouvailles achetées, je quitte les lieux, Lucie à mon bras (parmi mes amis non-voyants, je suis presque toujours celle qui a le meilleur résidu visuel, alors c'est toujours moi qui fais office de guide, pour mon plus grand plaisir d'ailleurs). Nous empruntons la ligne orange, partant du métro Berri pour nous arrêter à la station la plus près de chez moi: Beaubien.
Nous sortons de la station de métro et je constate avec désolation que l'autobus que nous devons prendre pour aller chez moi (le numéro 18 Beaubien) est déjà là et s'apprête à repartir, tous les gens qui l'attendaient étant montés à bord. Réalisant que nous n'aurons pas le temps de nous dépêcher suffisamment pour pouvoir le prendre, je dis à mon amie: «Je crois que nous ferions mieux d'attendre le prochain».
Mais, coup de théâtre… Après avoir légèrement avancé, comme s'il s'apprêtait à quitter définitivement l'arrêt, le chauffeur immobilise de nouveau son véhicule, question de bien se préparer au prochain virage qu'il devra effectuer. Pour moi, cela me laisse l'impression suivante: il nous a vues, Lucie et moi, et s'est arrêté pour nous permettre de monter à bord. Spontanément, je dis à Lucie: «Oh! Il s'est arrêté! Je crois qu'il nous a vues. Viens! On y va!» C'est ainsi que nous avançons, d'un bon pas, vers le mastodonte qui (l'histoire me l'apprendra dans quelques secondes à peine) repart déjà, puisque le chauffeur ne nous avait pas vues, en fait, mais se préparait seulement à effectuer un virage à droite… Puisque je crois toujours qu'il me voit, je m'avance jusqu'aux portes de l'autobus, étant plus que certaines qu'elles s'ouvriront pour nous permettre d'y monter. Mais l'autobus repart et, en amorçant son virage, me pousse violemment et me propulse par terre, couchée sur le côté droit, les deux jambes dans la rue et le reste du corps sur le trottoir… Je suis couchée par terre, trop abrutie par la douleur de ma chute pour avoir le temps de me relever, et j'aperçois très bien la roue arrière droite de l'autobus qui continue à rouler et qui se dirige, inexorablement, vers ma cuisse gauche… Tout cela se déroule à une vitesse folle, en quelques secondes… La roue approche et je me dis: «Ça y est… C'est terminé… J'ai eu une très belle vie heureuse, des bons parents, des bons amis, des bons professeurs… J'ai été aimée partout où je suis passée… J'ai sûrement fait tout ce que j'avais à faire ici…» J'étais absolument certaine de trouver la mort sous cette roue énorme et si lourde… Elle approche, puis roule sur ma cuisse gauche, mais le corps humain est si extraordinaire qu'il parvient à s'anesthésier de lui-même, afin qu'on ne ressente pas la douleur insupportable qui devrait normalement accompagner un tel traumatisme. Alors, tout ce que je puis dire sur la sensation qui accompagne une roue d'autobus qui vous roule sur le corps, c'est que c'est EXTRÊMEMENT LOURD, mais pas douloureux; du moins, pas sur le coup, mais croyez-moi, ça viendra, la douleur…
L'autobus a roulé sur moi… Mais… je suis toujours là! Bien vivante! Je respire sans peine! Wow! Quel miracle! Comment cela est-il possible? Tout à coup, j'entends une foule s'agglutiner autour de moi… Mon amie Lucie qui est catastrophée et qui panique, demandant qu'on appelle les secours… Puis, très vite, des ambulanciers et des policiers sont dépêchés sur les lieux et me bombardent de questions qui m'apparaissent toutes aussi saugrenues qu'énervantes, car je n'en comprends absolument pas l'utilité à ce moment. «Comment t'appelles-tu?» «Quel jour on est?» «Quelle heure est-il?» «Où es-tu?» Wooooo!!!!! Assez!!! Pourquoi ces foutues questions? C'est ridicule! Pourquoi aurais-je oublié mon propre nom? Franchement! Voici ce que je réponds, du tac au tac: «OK! Écoutez-moi bien: je m'appelle Katia Daraîche. J'ai 16 ans. On est le 4 octobre 1990. Il doit être rendu près de 21h avec tout ce niaisage-là. Je viens de me faire broyer par un maudit autobus et j'ai mal, alors pouvez-vous vous dépêcher à faire quelque chose pour que je cesse de souffrir le martyr ainsi? Merci beaucoup.»
C'est la procédure… Je ne dois pas m'endormir, pas perdre connaissance, alors on me parle… On demande le numéro de téléphone de chez moi, tous les numéros de téléphones utiles, bref. Puis, on procède à un examen des dégâts… Voilà qu'on passe les ciseaux dans mes vêtements: HORREUR!!! Pendant ce temps, j'essaie de voir ce qui bouge encore parfaitement et, oh! Je ne parviens pas à bouger ma jambe gauche… Pire encore, je ne la sens plus du tout… En plus, en tentant de bouger les jambes, j'ai l'impression que mon pubis est détaché du reste de mon corps et j'entends un «crounch» à vous donner des frissons de désagrément… Que se passe-t-il avec mes os? Suis-je en tout petits morceaux, coudonc?? On m'installe sur une civière afin de me hisser dans l'ambulance… Oh! Qu'elle est dure, cette civière! Comme si j'étais encore sur l'asphalte! Mais je ne dis plus rien; j'attends avec impatience d'être à l'hôpital et qu'on soulage mon mal qui est atroce maintenant… Vite!
Une fois arrivés à l'hôpital Sainte-Justine, on procède à tous les tests nécessaires: radiographies, échographies et autres. Constat: j'ai 5 fractures de bassin (dont 2 à l'avant, de chaque côté du pubis, d'où l'impression affreuse de le sentir détaché du reste de mon corps) et 3 à l'arrière… Puis, plus aucune circulation sanguine dans ma jambe gauche. Les médecins sont formels: lorsqu'ils ouvriront ma jambe afin de constater les dégâts, il y aura hémorragie, c'est clair. Ils ne savent pas s'ils parviendront à la sauver, cette jambe… Il se pourrait qu'ils soient dans l'obligation de procéder à une amputation… Mes parents, arrivés sur les lieux en toute hâte, protestent vigoureusement: «Faites tout ce que vous pouvez pour la sauver… S'il vous plaît….»
De mon côté, pendant que je passe tous ces tests, on se dépêche de soulager mes souffrances et, très vite, je perds toute notion du temps… pour plusieurs jours… Le dernier souvenir, mais certainement le plus émouvant pour moi, que je conserve du moment qui a précédé mon entrée en salle d'opération, est une toute petite conversation entre mon père et moi qui s'est déroulée à peu près comme suit:
Papa: «Mon amour, si tu te sors de cette épreuve-là, je lâche toute la cochonnerie que je consomme».
Moi: «Alors, mon amour, si j'ai pu t'offrir ce cadeau par mon épreuve, eh bien, ça aura donné quelque chose de formidable. Je m'en sortirai, je te le promets…»
Tout ce que j'ai pu savoir, par la suite, c'est que j'ai passé 12 heures sur la table d'opération, question d'effectuer des miracles pour tenter de rétablir une certaine circulation sanguine dans ma jambe gauche, le tout en transférant une veine très importante de ma jambe droite à la gauche, question de lui redonner une certaine circulation. On effectue aussi des pontages, bref, je suis bien loin d'être médecin, mais on procède, à l'aide de plusieurs interventions extrêmement délicates, à la reconstruction du système circulatoire de ma jambe gauche. On n'est pas encore sûr que ça tiendra le coup. C'est très risqué et il n'y a que de très faibles chances que ça fonctionne, mais on joue le tout pour le tout. On espère un miracle, un vrai. Aussi, il a fallu procéder à l'installation d'un fixateur externe dont le rôle est de maintenir les os de mon bassin dans leur position normale et de s'assurer qu'ils garderont la position jusqu'à ce qu'ils aient totalement repris ensemble… En clair, cela signifie que lorsque je me réveille de ce périple de quelques jours dans la brume du sommeil, je constate que j'ai des broches qui me sortent du ventre et qui me donnent l'impression que j'ai un truc très très lourd sur moi, dont je n'arrive pas à me débarrasser et je ne comprends pas trop ce qui m'arrive…
De plus, comme l'opération a été très longue et que ma respiration a probablement fonctionné au ralenti très longtemps, je suis branchée à un respirateur et, donc, je suis intubée. J'ai un tube dans le nez, puis un autre, ô malheur! dans la bouche! Je ne peux donc absolument pas émettre un son. Moi, ne pas parler? Catastrophe! Surtout que j'ai un milliard de questions à poser. Je veux savoir ce que j'ai, l'état dans lequel j'étais en arrivant à l'hôpital et comment je suis, maintenant. Et mes chances de m'en tirer indemne, quelles sont-elles? Quand vais-je pouvoir ressortir d'ici et retrouver ma vie d'avant l'accident? J'apprends les réponses à toutes ces questions, une bribe à la fois, au fil des conversations que j'entends entre les infirmières ou médecins et mes parents, qui sont les seules personnes autorisées à venir me voir, puisque je suis aux soins intensifs et que le nombre de visiteurs y est très restreint.
Heureusement, j'ai une famille exceptionnelle. Mes parents sont toujours là, au moins un des deux, auprès de moi… On me câline, on me cajole, on me parle afin de me rassurer, de me réconforter… Je reçois des doses massives de morphine, il va sans dire, pour apaiser autant que possible la douleur qui est reine maîtresse dans mon corps tout entier. Alors, lorsque je suis relativement bien soulagée, avec mes parents à mes côtés, qui me réconfortent et me sécurisent, je parviens à avoir l'impression de me sentir bien, enveloppée par leur amour.
C'est dans ce climat de solidarité extrême et d'indéfectible amour que je remonterai la pente, tout doucement, mais officiellement, trouvant mille et une façons d'agrémenter cette terrible épreuve, parvenant même à remonter le moral de mes visiteurs! Mais tout ce beau cheminement, laborieux mais si extraordinaire, je vous le réserve pour un prochain «petit bout de moi». Je vous donne donc rendez-vous, encore à l'hôpital Sainte-Justine, lors de mon prochain article, mais cette fois, pour vous faire vivre ma fulgurante remontée vers la santé!
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